Les Mousses de Brière au 17 -ème et 18 -ème Siècle
Au 17 et 18ème siècle les hommes étant partis naviguer au cabotage au long cours ou, embarqués sur les navires de guerre du roi, et les îles de Brière ne sont plus peuplées que par des femmes, des enfants et des vieillards qui tentent de survivre.
Les femmes aidées de leurs enfants travaillent le peu de terre qu’offrent les gagneries elles se contentent souvent d’une seule vache et subsistent de la pêche et de l’élevage de volatiles
Dans ces conditions se débarrasser d’une bouche à nourrir est une véritable aubaine et la paroisse de Montoir de par sa capacité à lever des équipages tant au cabotage qu’au long cours voire au service du roi allait leur fournir cette aubaine en faisant enrôler leurs fils à bord des navires.
Il s’agissait généralement des aînés des familles dotées d’une importante fratrie On les engageait dès 7 – 8 ans– mais le plus souvent dans la tranche d’âge des 12à 16 ans.
Le fait qu’à cette époque les deux tiers des hommes des paroisses de Brière étaient des marins essentiellement de la paroisse de Montoir, ces jeunes étaient formés sur le tas,
L’enfant qui devenait mousse à bord d’un navire était souvent victime d’une « double peine » sociale., il était d’abord victime de la misère locale qui le précipitait hors de son univers familial et social, et ensuite confronté à la promiscuité du navire, un monde d’hommes où l’apprentissage était fait de brutalités
Pour ces enfants, la souffrance naissait tout d’abord de la déchirure de la séparation familiale, pour de très longs mois. Mais, Il y avait également le drame d’être, exposé aux règles rudes et strictes de la vie à bord. L’adieu à l’enfance. Le passage au statut d’adulte se jouait en quelques mois, du quai au pont d’un navire.
Ces enfants sont les l’universels souffre-douleurs du bord.
Sans formation ni préparation à cet environnement hostile il ne savent pas à qui obéir, car tout le monde les commande Les coups pleuvent sur ces malheureux qui ne peuvent satisfaire tout l’équipage en même temps. Ils sont souvent frappés à coups de garcette (fouets faits de cordages), voir en cas d’insoumission, mis aux fers à fond de cale ou pullulent les rats dans des conditions les plus insalubres…
Par contre, il n’en est pas de même sur tous les navires.
Il faut différencier les traitements et conditions qui leur sont appliqués sur les petits caboteurs (lougres, sloops, goélettes ou petits bricks) de celles en vigueur sur les voiliers long-courriers et les navires du roi.
C’est sur les petits navires affectés au cabotage, que les mousses mènent l’existence la plus pénible.
Le capitaine, maître au cabotage ou patron au bornage, est assez souvent un homme rude, souvent inculte qui est arrivé tardivement au commandement. Imbu d’autorité car il a été élevé durement lui-même, et trouve tout naturel que les autres le soient à leur tour.
Si, par surcroît ces capitaines ont l’habitude de boire, leur dureté ne connaît plus de bornes. Sur ces navires, l’équipage est parfois réduit à l’extrême (le capitaine, 2 matelots et le mousse) et on demande à ces enfants un travail d’homme.
L’existence que mènent les marins du cabotage est très pénible.
La veille incessante pour éviter les dangers de la navigation le long des côtes. Les forts coups de vent essuyés en Manche et dans le golfe de Gasconne ou, la seule solution est de se mettre à la cape et être balloté comme un bouchon avant de pouvoir se mettre à l’abri.
Cette existence de misère et de labeur incessant rend ces hommes insensibles et violents.
À bord des caboteurs, la principale fonction des mousses est de faire la cuisine. Sur l’avant du bateau, un petit fourneau, leur permet de préparer les repas de l’équipage Cette fonction de cuisinier ne les exonère pas dans le gros temps d’effectuer les manœuvres. Ils sont amenés à laisser leurs casseroles et marmites pour aller carguer les voiles, mais à leur retour la cuisine a été souvent inondée par des paquets de mer, le fourneau a éteint les casseroles renversées et la nourriture est passée par les dalots (trous d’évacuation percés dans la coque du navire, pour l’écoulement des eaux).
Les hommes d’équipages dont le ventre réclame pitance faute de pouvoir se sustenter passent alors leur colère sur leurs dos.
Las des mauvais traitements subis au cabotage les mousses dès qu’ils le peuvent tentent de réaliser leur rêve, à savoir embarquer à bord des voiliers long-courriers ou des navires du roi.
Ces bâtiments sont commandés des capitaines au long-cours secondés par un véritable état-major (second capitaine- lieutenants- maitre d’armes -bosco),
En dehors des hommes d’équipage et du médecin du bord un cuisinier figure au le rôle d’équipage
Sur ces navires les mousses ne sont plus maltraités.
En dehors de la manœuvre, ils ont pour charge de balayer le pont, de nettoyer les cages à poules, de soigner les bêtes, ainsi que d’apporter à l’équipage, les rations de nourriture qu’ils vont chercher à la cuisine. Sur les navires du Roi pendant les batailles navales ceux-ci servaient de porte cartouches aux canonniers.
Paradoxalement c’est au port lors des escales que leur travail est le plus éprouvant. Comme les mousses ne sont pas autorisés à partir en bordée pour fréquenter les tavernes et se distraire avec les catins, ils participent à l’entretien et à l’avitaillement du navire chargeant les provisions et outils amenés par les shipchandlers (approvisionneurs de navires) Leur journée qui débute à 4 heures du matin et se termine au coucher du soleil est éreintante. Sur ces navires, ce ne sont pas les mauvais traitements qui finalement sont rares, mais la pénibilité des tâches qui usent ces enfants.
Face à ces conditions pénibles tant pour leur physique que pour leur moral nombre d’entre eux préféraient déserter voire rompre leurs contrats (Il faut noter qu’un bon nombre périssaient en mer)Leur retour dans les chaumières était mal vécu. Pour leur famille en dehors de l’humiliation provoqué par celui-ci, on se retrouvait avec une bouche de plus à nourrir
Jeudi 6 juillet :David Monvoisin et Charlotte Brenugat. Le pain bio
Jeudi 13 juillet :Jacques Hédin. Les Briéron(ne)s et leurs activités dans le marais de
Grande Brière ou Us et Coutumes sur le marais de Brière au fil du temps
Jeudi 20 juillet :Blandine Placet. Les plantes médicinales
Jeudi 27 juillet :Bernard Hervy, L’évolution de la pêche à La Turballe de la fin du 19ème àaujourd’hui
Jeudi 3 août :Nicolas Roux. Les abeilles et le miel.
Jeudi 10 août :Alain Poulard. Le vin dans l’histoire
Jeudi 17 août :Yves-Marie Allain, Rhododebdron, plante indigène ou plante invasive ?
Jeudi 25 août :Geonanni Olivares. La bière et le jardin
Jeudi 31 août :Soirée festive Michelle Lefeuvre et Guy Nicoleau chantent les femmes de Montoir
Les intervenants :
David Monvoisin et Charlotte Brenugat sont les boulangers des Pains Maritimes de Saint Nazaire
Jacques Hédin, ancien chargé de mission au Parc Naturel Régional de Brière, est un grand connaisseur du marais, de sa faune et de sa flore
Blandine Placet : Passionnée de voyages et de lectures, les connaissances pharmaceutiques de Blandine se sont enrichies de l’utilisation des plantes dans les différentes recettes traditionnelles.
Bernard Hervy, « Président de l’association Au Gré des Vents », association qui gère le musée « La Maison de la Pêche » à La Turballe
Nicolas Roux, apiculteur montoirin, produit le miel bio du « Rucher des Marais ». C’est un grand connaisseur de abeilles et de leur environnement.
Alain Poulard, ancien de l’Institut Français de la vigne et du vin. Membre de l’association « Le Berligou » de Couëron.
Geovanni Olivares, est architecte, urbaniste, paysagiste et brasseur. Fondateur de la brasserie
Veracruz à Saint Nazaire et co-president de l’association « les collemboles » qui milite pour un
brassage de cultures créatives et festives.
Yves-Marie Allain, ingénieur horticole, ancien directeur du Jardin des Plantes de Paris a écrit de nombreux ouvrages. Il a été à la création du jardin Montoirin.
Entrée aux conférences gratuite. Le Jardin est ouvert à la visite du 20 mai au 24 septembre, visite libre. Près de Trégonneau . Fléchage à partir de la Gendarmerie
En 2014, lors de la création du Jardin Médiéval des Caves, à Montoir de Bretagne, les bénévoles du GATM (Groupe Animation Tourisme Montoir) ont planté trois cépages de vigne ayant une histoire avec la région : La folle blanche, distillée et destinée aux voyages vers l’Amérique, le Pinot d’Aunis, arrivé à Escoublac au milieu du 11e siècle et Pinot de Bourgogne, plants donnés, vers 1460, par Charles Le Téméraire, duc de Bourgogne à son cousin François II, duc de Bretagne, qui l’a planté au lieu dit « Berligou », à Couëron, qui a donné le nom à ce cépage : « Le Berligou ». En 2018, les bénévoles de l’association ont ajouter une vingtaine de plants au Jardin Médiéval. Le 8 septembre dernier, une première vendange présentait un excellent état sanitaire et accusait un titre alcoolique potentiel voisin de 12,5%. « Après éraflage (suppression de la partie ligneuse de la grappe), une cuvaison de 24 h à 16°C a été appliquée sur la vendange. Après décuvage, pressurage du marc et assemblage des jus, la fermentation alcoolique a été initiée avec l’apport d’un pied de cuve composé de levures indigènes. Conduite à 16•C, la cinétique fermentaire à duré 21 jours. Après stabilisation et soutirage du vin nouveau sur lies légères, celui-ci est conservé en bonbonne tout l’hiver à basse température pour favoriser la précipitation de tartre. Il devrait subir un collage pour clarification finale à la gélatine avant une mise en bouteilles prévue au début du printemps. Une vingtaine de bouteilles composera cette première cuvée de 12,4 degré alcoolique » explique Alain Poulard, ancien de l’Institut Français du Vin et de la Vigne, membre du GATM et de l’Association Le Berligou de Coëron. Daniel Le Barillec, du GATM, est chargé de réaliser une belle étiquette pour ce vin que l’on découvrira lors de l’ouverture du Jardin Médiéval
Alain Poulard, ancien de l’Institut Français du Vin et de la Vigne, membre du Groupe Animation Tourisme de Montoir et de l’association Berligou de Coëron, élève avec soin et passion les vins de nos vignes……
1702, Denis Leprestre, natif de Montoir, meurt comme esclave à Salé port de la côte atlantique du Maroc.
1707, René Leprestre est de retour à Montoir après six années de captivité et d’esclavage.
1709, Denis Moyon est de retour à Montoir après huit années de captivité et d’esclavage.
1712, Pierre Charon, libéré après 11 années d’esclavage décède sur la route du retour à Malaga.
1716, Charles Jehaneau, est de retour à Montoir après 14 années d’esclavage.
Capturé et réduit à l’état d’esclave, c’est ainsi que fin 1701 se termine le voyage au long cours de cinq montoirins qui avaient quittés Nantes en novembre 1701 pour se rendre à Saint-Domingue aux Antilles. Membres de l’équipage avec dix autres marins, ils naviguaient sur le Gaillard, navire nantais de 70 tonneaux commandé par le capitaine montoirin breveté depuis 1699, René Leprestre, quand le navire est attaqué dans l’océan Atlantique par l’un des chébecs des redoutés corsaires salétins. L’équipage français capturé est emmené au port de Salé (près de Rabat) pour y être vendu comme esclave et sans doute utilisé sur les chébecs pour les manœuvres ou comme rameurs.
Chébec – Esclavage
Deux mots employés dans le précédent paragraphe méritent quelques explications et un court développement : chébec et pourquoi employer le mot esclavage ?
Le poète français Paul Valéry (1871-1945) regrette la disparition de la marine à voile et cite le chébec ce navire hispano-barbaresque, avec une nostalgie certaine dans un texte de 1936 « Ces bateaux comme il n’en existe plus guère, ces types séculaires que la vapeur et le pétrole ont exterminés, les étranges chébecs par exemple, aux formes d’une élégance orientale, qui avaient la proue grêle et bizarrement dessinée, … ».
Un chébec de la méditerranée
L’origine du nom de ces navires « d’élégance orientale » serait le mot catalan, xabec, qui désignait aux XVe – XVIe siècles un petit bateau de pêche de Catalogne, à voile latine. Amélioré et transformé, il devient un voilier léger, très manœuvrant, à coque fine, aux extrémités élancées, à fort éperon, avec trois-mâts portant des voiles latines. Le mât de misaine ou trinquet incliné sur l’avant lui donne une allure caractéristique. En absence de vent, des rames peuvent être utilisées. La configuration du pont impose alors de ramer debout. Certains chébecs sont armés pour la guerre ou la piraterie. Atteignant une quarantaine de mètres, ils peuvent recevoir 280 hommes et porter une surface de voiles de l’ordre de 800 m². Pour l’attaque, entre les rames, de petits sabords permettent installer une vingtaine de canons. Ces navires taillés pour la course et à faible tirant d’eau d’origine hispano-arabe seront très largement utilisés au cours des XVIIe et XVIIIe siècles en Méditerranée par les marines royales espagnole et française, par les marchands, mais également par les corsaires et pirates sillonnant les côtes barbaresques de la Méditerranée et celles marocaines de l’Atlantique quant ils ne s’aventurent pas jusqu’aux côtes irlandaises !
Quant à l’esclavage, il a débuté bien avant la traite négrière organisée par les Européens en Afrique de l’Ouest. Il est pratiqué par tous les peuples de l’Antiquité, Égyptiens, Grecs, Romains, peuples nomades du Moyen-Orient… en recherche de travailleurs et de soldats. A compter du VIe siècle de notre ère, avec l’extension continue de la religion musulmane et la conquête de nouveaux territoires, la nécessité de rechercher de la main-d’œuvre et des soldats se développe, d’autant que le calife Omar, (581-644) est à l’origine d’une législation qui interdit de mettre en servitude un musulman. Cette législation va pousser les musulmans dès les VIIe et VIIIe siècles à chercher des esclaves hors de leurs terres, c’est-à-dire en Afrique noire et en Europe orientale. Les esclaves viennent des Balkans, du Caucase, de l’Afrique de l’ouest et orientale et des équipages des navires européens. Les nations européennes ne sont pas en reste, leurs marines et chevaliers de Malte prennent en chasse ces barbaresques et les envoient ramer sur les galères de sa majesté très catholique, le roi d’Espagne ou de sa majesté très chrétienne, le roi de France. Du XIIe au XVIe siècle, une grande part de commerce de la méditerranée est aux mains des marchands de Gènes, Florence et de la Catalogne, les marchés aux esclaves y sont florissants.
Confrontant les diverses sources, l’anthropologue spécialiste du monde musulman, Malek Chebel estime dans son ouvrage L’esclavage en terre d’Islam, paru en 2007, à plus de 20 millions le « volume total de l’esclavage en terres arabes et musulmanes » durant les quatorze derniers siècles. Ce nombre englobe des captifs d’origines ethniques et géographiques fort diverses aussi bien les captifs des guerres slaves, les concubines et les domestiques des régions du Caucase, de l’est de la mer Noire que les domestiques noirs achetés à des négriers ou razziés dans les villages du Sahel, les marins chrétiens capturés par les corsaires barbaresques en Méditerranée.
Afin de libérer les marins et autres européens chrétiens capturés et soumis à l’esclavage, un ordre religieux catholique est fondé par un languedocien Pierre Nolasque (1189-1256) pour racheter « les chrétiens captifs des pirates maures et réduits à l’esclavage. » Il s’agit de l’Ordre des Mercédaires, encore appelé Ordre de Notre-Dame-de-la-Merci (Ordo Beatæ Mariæ Virginis de Redemptione Captivorum). Au cours des siècles cet ordre aurait participé à la libération d’environ 500 000 captifs chrétiens !
Rachat des captifs chrétiens par des Mercédaires vers 1670
Qui sont les corsaire salétins à l’origine de la prise du Gaillard
En 1701, Moulay Ismaïl ben Chérif (vers 1645 – 1727) est au pouvoir depuis 1672 comme sultan du Maroc. Alors que Louis XIV règne sur la France, Moulay Ismaïl sur un pays qui sera à l’apogée de sa puissance en reprenant bien des ports de la côte marocaine tenus par les Européens, faisant des milliers de prisonniers chrétiens, mais également en chassant d’Alger les Ottomans. Son règne est le plus long, plus de cinquante années, de la dynastie alaouite dont le roi actuel du Maroc descend. A côté de ces conquêtes et succès militaires , c’est un roi bâtisseur, dont le grand palais de Meknès, des jardins, des portes monumentales, de plus de quarante kilomètres de murailles et de nombreuses mosquées.
Mais une partie de sa fortune et de son autorité repose sur la flotte qu’il contrôle à Salé-le-Vieux et Salé-le-Neuf (Rabat) sur la côte atlantique du Maroc.
Vue actuelle du port de Salé au Maroc
Les corsaires de Salé, les Salétins ont pour mission d’approvisionner le sultan en esclaves chrétiens, en armes et tout ce qu’ils peuvent prendre lors de leurs razzias tant en Méditerranée qu’en Atlantique et Mer du Nord. Moulay Ismaïl est surnommé le « roi sanguinaire » par les Européens, en raison de sa cruauté et de sa justice sommaire et un rituel du diocèse de Coutances (Normandie) « Mon Dieu gardez-nous des Salétins »
Le rachat mouvementé des marins montoirins
Ordre des Mercédaires, Ordre de Notre Dame de la Merci
L’ordre des Mercédaires va intervenir afin d’essayer de libérer les marins montoirins. Comme souvent lors de captures et de rachat d’esclaves, les négociations sont aléatoires, parfois difficiles, et les résultats incertains. En effet, les conditions ne sont guère à l’avantage des chrétiens qui souvent doivent payer, mais également fournir des esclaves en compensation.
Entre 1704 et 1716, trois voyages sont organisés par les Pères de l’ordre des Mercédaires dans les états du Maroc pour y faire un rachat des captifs et esclaves Français.
En janvier 1704, des captifs-esclaves dont René Leprestre et Charles Jehanneaux signent une lettre de remerciements au Comte de Pontchartrain, secrétaire d’État de la Marine de Louis XIV, pour le remercier des secours envoyés et exprimer l’espoir prochain de leur libération. Déception, le 22 avril 1704, aucun marin de Montoir ne sera du voyage de retour de Salé à Nantes. Seulement 12 esclaves prendront place à bord du Patriarche navire deNantes, commandé par René Darquistade, futur maire de Nantes. Le voyage ne fut pas de tout repos et le Patriarche devra affronter les éléments déchaînés et finira sa course échoué sur un banc de sable au large de Paimbœuf.
En Août 1706, Étienne Pillet, un marchand français, renégat, installé à Salé, est chargé par la République de Gènes de négocier le rachat des esclaves génois. Il se rend à Meknès, capitale du sultan Moulay Ismaïl, et obtient le rachat de 18 esclaves Génois moyennant 730 piastres par tête et au même prix, trois esclaves français, Michel Baron natif de St-Malo, Raymond Larbourie natif d’Oléron et René Leprestre natif de Montoir. Tous rejoignent Cadix (Espagne) et de là, René Leprestre s’embarque sur un bateau français et retrouve Montoir en mai 1707.
En 1708, Pillet obtient la liberté de deux autres esclaves dont Denis Moyon, natif de Montoir qui fut négocié pour 630 piastres et un Maure. Sa liberté fut facilitée car il était boiteux depuis le début de sa captivité. Mais sur le navire du retour, libre, miracle, plus besoin de bâton pour se déplacer ! Il est de retour à Montoir en 1709.
Les Mercédaires rencontrent les barbaresques pour racheter des captifs esclaves
Malgré les quelques libérations obtenues par le dénommé Pillet, les religieux de l’Ordre de Notre-Dame-de-la-Merci s’activent pour la libération de dizaines voire centaines de chrétiens captifs et esclavages. En juillet 1706, ils proposent pour le rachat de chacun des esclaves français, 200 piastres et un Maure, plus un présent pour le roi et 1000 piastres pour l’intermédiaire. La mission échoue. Cinq ans plus tard, en 1711, un accord est enfin conclu pour le rachat d’une vingtaine de Français. Si la mission d’échange se met en route en octobre 1711, après bien des vicissitudes dues aux difficultés du voyage et aux intempéries, l’échange se déroule à partir du 27 avril 1712 au bord de la mer d’où ils sont conduits à Ceuta, ville sous domination espagnole depuis le XVe siècle. Delà, les captifs redevenus libres partent pour Cadix et attendent le mois de septembre 1712 pour embarquer sur un navire qui doit se rendre à Marseille après avoir pris un chargement d’huile d’olive à Malaga. Parmi les libérés, Pierre Charon, natif de Montoir. Son état ne lui permet pas de reprendre la mer après l’escale de Malaga. Il reste à terre et décède à Malaga quelques mois plus tard.Malgré les années, les négociations, transactions, échanges, tous les marins de Montoir ne sont pas encore libres. Reste Charles Jehaneau qui restera 14 années comme esclave avant d’être racheté 300 piastres et échangé contre un Maure, et ce, en 1716. De retour à Montoir, il décède quelques années plus tard à l’hôpital de Nantes.
Petite histoire de la grande histoire de la marine et des aventures d’hommes partis sur les mers pour vivre et faire vivre leur famille, qui ne demandaient qu’à exercer leur métier, et conduire à bon port des hommes et des chargements. Les éléments naturels n’étaient pas toujours les seuls aléas de la navigation, la volonté de conquête, de possession et de main-mise sur les hommes par certains individus, rendaient encore plus incertaine la navigation des navires.
Yves-Marie Allain – janvier 2023.
Marins montoirins de l’équipage du Gaillard
capturés par les Salétins en novembre 1701
René LEPRESTRE (Capitaine), né le mardi 6 décembre 1667 à Montoir section de Saint-Malo, est le fils légitime de Gilles Leprestre et de Julienne Richard. Il se marie avec Jeanne Mahé (1673-1728) le mardi 3 juin 1692 à Montoir. Il est breveté capitaine en 1699.
Pierre CHARON, Matelot, beau-frère du Capitaine Leprestre, né le mardi 28 avril 1676 à Montoir, section de Saint-Malo-de-Guersac, est le fils légitime de Germain CHARON et de Julienne DUPIN. Sa mère Julienne meurt le 27 mai 1690, Pierre est âgé de 14 ans. Son père Germain meurt le 23 octobre 1692, Pierre est âgé de 16 ans. Il se marie avec Jacquette Leprestre (la sœur du Capitaine René Leprestre), la fille légitime de Gilles Leprestre et de Julienne Richard le mardi 1er juillet 1698 à Montoir. Pierre Charon décède à Malaga sur la route du retour en France, quelques mois après sa libération.
Charles JEHANEAU, Matelot, né le jeudi 16 juillet 1682 à La Croix de Saint-Malo en Montoir, est le fils légitime de Arthur Jehaneau et de Élisabeth Charon. Il se marie avec Perrine Halgand vers 1718 à Montoir. Il décède le dimanche 12 décembre 1723, à l’âge de 41 ans, à Montoir.
Denis MOYON, Matelot, né le jeudi 30 juillet 1676 à Trignac en Montoir est le fils légitime de Denis Moyon et de Jeanne Vincent. Il se marie le lundi 26 octobre 1699 à Montoir avec Guillemette Macé (1680-1731). Denis Moyon décède en septembre 1723, à l’âge de 47 ans, à l’hôpital de Nantes.
Denis LEPRESTRE Matelot fils de Pierre, mort en esclave à Salé en 1702.
Remerciements :
Cet article n’a pu être écrit que grâce à l’ensemble des recherches et des éléments sur les marins-esclaves de Montoir paru dans l’article d’Yves Gourhand, Des Marins Montoirins Esclaves au Maroc (1701-1716), (non daté)mis en ligne sur: http://lastephanoise.fr/articles-rediges-et-mis-en-ligne-par-yves-gourhand.html
courte bibliographie
Yves Gourhand, Des Marins Montoirins Esclaves au Maroc (1701-1716).
Mohammed Ennaji, Le Sujet et le Mamelouk. Esclavage, pouvoir et religion dans le monde arabe, éd. Mille et une nuits, 2007.
Malek Chebel,L’esclavage en terre d’Islam- le regard d’un anthropologue, 2007.www.herodote.net
Ordre de Notre-Dame-de-la-Merci: https://fr-academic.com/dic.nsf/frwiki/2042466
La maquette d’un chébec exposée au Musée de la Marine en Bois du Brivet à Montoir de Bretagne
En ce lundi 9 novembre 1942, le soleil brille à Saint-Nazaire. A l’école d’apprentissage du chantier de Penhoët, les apprentis viennent de reprendre le travail au début de l’après-midi. Ils sont loin de se douter que cette belle journée d’automne va se transformer, dans quelques minutes, en cauchemar.
La guerre dans le monde et la situation en 1942 : L’Allemagne a déclaré la guerre à la Russie le 22 juin 1941, rompant ainsi le pacte germano-soviétique. A la suite du bombardement de Pearl Harbor par les Japonais le 7 décembre 1941, les Etats-Unis entrent à leur tour dans la guerre qui devient mondiale. Le conflit se poursuit sur différents fronts, et l’année 1942 marque un tournant décisif. En Europe, l’armée soviétique entame sa contre-offensive le 1er janvier 1942. La bataille de Stalingrad débute dès le 17 juillet. Les Allemands capituleront le 3 février 1943. En Afrique, les troupes anglaises et françaises libres affrontent les Allemands, commandés par Rommel. La bataille de Bir-Hakeim les bloque dans leur avancée vers Suez. Après la bataille de Tobrouk, l’avance allemande en Egypte est définitivement stoppée. Le 8 novembre, les troupes anglaises et américaines débarquent en Afrique du Nord, au Maroc et en Algérie. En France, le 11 novembre, Hitler déclenche l’opération « Attila », et la zone libre est envahie. La flotte française se saborde à Toulon le 27 novembre. Dans le Pacifique, la bataille des Philippines fait rage. Entre le 3 et le 7 juin, la flotte japonaise est défaite par les Américains au cours de la bataille de Midway. Début juillet, l’armée américaine débarque à Guadalcanal occupée par les Japonais, qui évacueront l’ile en février 1943. La reconquête du Pacifique est commencée.
Le bombardement du 9 novembre 1942 : Saint-Nazaire a déjà subi de nombreux bombardements, le premier d’entre eux par des bombardiers allemands dès le 12 juin 1940. Ceux-ci reprennent en 1941, de petites formations d’avions britanniques effectuent des raids, la plupart de nuit, sur le port et les chantiers. La base des sous-marins, dont 3 alvéoles sont construites dès la fin juin 1941, constituera également un objectif, bien qu’elle offre, étant donné sa construction, une grande résistance aux bombes alliées.
Vue aérienne de Saint-Nazaire en 1942 prise par la RAF. Imperial War Museum
On dénombrera pour 1941 37 victimes civiles, 13 tués et 24 blessés, au cours de 20 bombardements. En 1942, les bombardements de la R.A.F. se poursuivent et s’intensifient. Ils concernent les mêmes objectifs, auxquels s’ajoutent des opérations de mouillages de mines dans l’estuaire, ainsi que des repérages et photographies d’objectifs. Des bombes incendiaires sont utilisées dès le 7 janvier.
Les Américains, après leur entrée en guerre, transfèrent sur le sol britannique de nombreux avions, bombardiers et chasseurs, ainsi que pilotes, aviateurs et tout le personnel au sol, tout juste formés. Ils ont prévenu, par tracts et par radio, de l’imminence d’attaques aériennes sur les sites stratégiques en France, comme les bases de sous-marins, les gares de triage, les usines, les ports, en demandant aux populations de se tenir à distance de ces objectifs.
Un des ateliers de l’école d’apprentissage, début des années 30, SNAT-Ecomusée
Lorient a été bombardée le 21 octobre, Brest le 7 novembre. C’est au tour de Saint-Nazaire en ce funeste lundi 9 novembre 1942. La ville va connaitre son premier bombardement américain, et qui plus est, en plein jour. A l’école d’apprentissage, environ 180 apprentis âgés de 14 à 18 ans, sur les 220 que compte l’école, reprennent le travail en début d’après-midi, sous la surveillance d’une vingtaine de moiteurs. La sirène retentit à 13h45, mais les apprentis ne s’affolent pas, et regagnent joyeusement leurs abris situés dans le parc à tôles, dans la cour de l’école. Il y a déjà eu des alertes et ils prennent ça « à la rigolade ». Certains discutent entre eux du débarquement allié de la veille en Afrique du Nord. Ces abris au nombre de deux sont des tranchées profondes de 1,80m tracées en zig-zag et étayées par des madriers. Elles sont recouvertes d’épaisses tôles destinées aux bordés des navires. Quelques « indisciplinés » s’amusent même à compter les avions qui s’approchent et sont déjà la cible de la défense aérienne allemande. De nombreux témoins, tant à Saint-Nazaire que dans la région, entendent un énorme grondement et aperçoivent les forteresses volantes, en formation de combat, volant très bas et se dirigeant vers Saint-Nazaire.Les bombardiers, au nombre de 43 (31 B 17 F et 12 B 24 F) se présentent en deux vagues, l’une venant de la terre, l’autre de la mer, et ils vont larguer leur mortelle cargaison. Des bombes vont tomber sur l’abri situé le long de la Loire, dans le parc à tôles. Celles de la deuxième vague s’abattront vingt minutes plus tard sur les élèves rassemblés dans l’autre abri, dans la cour du réfectoire.
Tableau d’Emile Guiot, apprenti rescapé, représentant sa vision du bombardementdu 9 novembre 1942, SNAT-Ecomusée
Les témoignages des apprentis et du personnel rescapés nous permettent de mieux comprendre l’horreur de cet évènement . Quelques d’entre eux qui vont être cités plus en détail permettront de mieux comprendre le déroulement de cette tragédie. Emile Baron a 14 ans et est en première année. « On voyait dans le ciel bleu des points briller, c’étaient les avions qui arrivaient en formation, entourés des flocons blancs de la DCA. Quand je suis arrivé à l’entrée de la tranchée, j’ai vu les premières bombes tomber dans la Loire. Puis ça a été le chamboulement et le néant. Quand je me suis réveillé, j’ai entendu crier « les voilà qui reviennent. ». Et ça a recommencé. Je me suis évanoui. » Emile retrouve ses esprits après le passage de la seconde vague de bombardiers : « J’étais entouré de terre. Je voyais le jour, mais j’avais un pied coincé par un madrier. J’ai délacé ma chaussure, en vain. Ça gueulait derrière un mur de terre, j’ai fait un trou avec mon pied libre. Il y avait là Paul Laniel et Prosper Beauchêne. Ils ont pu passer la tête pour avoir de l’air ». Les trois adolescents sont dégagés vers 18h30. « Les sauveteurs déblayaient, mais on prenait des pelletées de terre sur la tête. J’étais à plat ventre. Un camarade était debout à côté de moi, enfoui jusqu’à la poitrine. Nous avons essayé de le dégager, en grattant avec la main, mais il a été enseveli ; Après nous, les sauveteurs n’ont sorti aucun survivant. Le lendemain matin, les corps qu’ils dégageaient étaient encore chauds. ». Emile souffre d’une blessure à la jambe et a le nez cassé.
Points de chûtes des bombes tombées entre 1941 et 1943 dans la zone
de l’école d’apprentissage. (livret des apprentis rescapés)
Joseph Michel a 15 ans. « On entendait les explosions. La terre s’est mise à vibrer. Quand les moniteurs sont sortis, ils sont revenus en nous disant : c’est tombé sur l’autre abri. Des apprentis et des moniteurs sont ensevelis. Les plus costauds sont allés les déblayer. Alors les avions sont revenus. J’ai regardé par la porte de l’abri, j’ai vu une gerbe de terre voler du côté du réfectoire. Je suis rentré dans l’abri. Puis plus rien, le néant. ». Joseph reste dix jours dans le coma. Il est amputé des deux jambes, l’une à cause de sa cheville complètement broyée, l’autre quelques jours plus tard pour stopper la gangrène. Après une rééducation, après la guerre, il reviendra travailler au chantier. Raymond Juvenot a 15 ans. Comme ses deux camarades, il est réfugié dans l’abri des apprentis chaudronniers et tôliers : « C’est alors qu’on a pris la purée. J’ai été enterré jusqu’au cou. Je n’ai même pas entendu les explosions. La bombe est tombée à 6 m de moi. La terre montait, montait… Ça va vite dans ces moments-là. Je me suis dégagé tout seul. Je n’avais pas de blessures, seulement le dos un peu noir. Il n’y avait plus personne. Puis le premier que j’ai aperçu était Joseph Michel, au fond d’un entonnoir. Les sauveteurs ont dû arriver dix minutes après. En attendant, j’ai essayé de le sortir, mais je ne pouvais rien faire Puis je ne sais plus ce que j’ai fait. J’ai erré et je me suis retrouvé en haut de la direction. Là, quelqu’un m’a offert un verre de Pernod. J’en avais bien besoin. Puis je suis revenu sur les lieux ». Henri Roide se trouve complètement enfoui après le passage de la première vague, seule sa tête ressort de terre : « J’ai repris connaissance après le passage de la deuxième vague. Je n’entendais rien, mais je voyais tout, des gens qui s’affolaient autour de moi. Je ne pouvais pas parler. Deux jambes sortaient de terre à un mètre de moi. Les sauveteurs m’ont dégagé, ils m’ont mis sur un brancard et m’ont transporté. Une bombe est tombée à l’endroit précis d’où ils m’avaient tiré. » Transporté sous la cale qui servit à la construction de Norrmandie, Henri souffre d’une fracture aux deux jambes et d’une blessure à la tête. Albert Thorel, apprenti de première année, se rend aux abris l’esprit tranquille, une fausse alerte ayant eu lieu quelques jours auparavant. Mais l’inquiétude le gagne très vite quand il entend les bombardiers au-dessus de sa tête. Il rejoint l’abri, où les apprentis s’entassent et où la peur les gagne. Sa curiosité de gamin l’incite cependant à se diriger vers une sortie de secours pour apercevoir les avions. Ne voyant rien, il revient vers l’entrée malgré les recommandations des professeurs. Au moment où la première bombe tombe, la secrétaire, Mlle Kergall, leur dit « Les gars, reculez, vous allez vous faire tuer. » Ce seront ses dernières paroles. Les bombes tombent dans tous les sens, et Albert ne se souvient de rien : il s’est évanoui. « Quand je repris connaissance, je me rendis compte que j’étais enterré. Il ne me restait plus que la tête dehors et les deux bras en l’air, je ne pouvais plus respirer sous les tôles qui devaient nous protéger ; c’était affreux, les uns criaient en appelant « maman, maman ! », d’autres priaient pour qu’on vienne nous sortir ; un camarade qui ne savait pas prier demanda comment faire. Un autre de lui répondre « Répète après moi ». Un autre encore s’inquiétait de son frère qui, je devais l’apprendre plus tard, était parmi les victimes ». Albert ne sait pas combien de temps a duré ce cauchemar, toujours présent dans sa mémoire. Il ne peut plus respirer et perd à nouveau connaissance. Il revient à lui sur la civière qui l’emmène vers le poste de secours. Il voit alors les premiers morts. La deuxième vague survient alors qu’il vient d’arriver au poste. Les bombes tombent dans la même zone. Ses camarades et lui qui viennent d’être dégagés doivent à la rapidité des secours d’être encore en vie.
Les trois frètes Thorel, Albert est à droite, coll. Françoise Thorel-Tattevin
Une fois l’alerte terminée, il rejoint l’infirmerie à pied avec quelques rescapés, marchant sur ses chaussettes, ses chaussures étant restées dans la tranchée. Le petit autobus des ingénieurs les transporte à l’hôpital. Il souffre des reins et sa bouche est pleine de terre. Il ne réalise pas encore ce qui lui est arrivé et a de la peine à croire qu’il est vivant. Une fois alité, avant que le docteur ne l’examine, c’est la longue visite des mères cherchant désespérément leur fils et qui le regardent longuement en le questionnant, moment très pénible pour lui. Ses frères ayant appris qu’il est rescapé le recherchent également, et passent plusieurs fois devant lui avant de le reconnaître. Sur l’avis du docteur, ils le ramènent à la maison où un médecin diagnostique des contusions aux reins. Le 11 novembre, de retour sur les lieux, à la vue du spectacle de désolation et de mort qu’offrent les tranchées bouleversées, il se demande comment il a pu sortir vivant d’une telle catastrophe. Toute sa vie, Albert restera hanté par les souvenirs de ce drame. Quelques jours avant son décès en 2017, il évoquait encore à ses proches la vision des avions dans le ciel qui ne l’avait jamais quittée.
Le délicat travail des sauveteurs
Tôlerie et cours d’apprentissage, juin 1945, SNAT-Ecomusée
Fernand Michel, jeune ouvrier électricien tout juste sorti de l’apprentissage, se trouve à l’atelier de tuyauterie au moment du bombardement. Avec un camarade, Henri Perrais, ils se dirigent vers la zone bombardée, aperçoivent un premier ouvrier tué près du parc à tôles. Ils aperçoivent alors la tranchée-abri, complètement refermée, enterrant vivants ses occupants dans un mélange de terre et de bois de coffrage. Avec trois autres sauveteurs, ils prennent en charge Henri Roide qui vient d’être dégagé et placé sur un brancard. Ils se dirigent vers le poste de secours de la cale Normandie, quand apparait la deuxième vague d’avions., volant en formation impeccable au milieu des tirs de D.C.A. L’avion de tête lâche une fusée qui descend vers le sol, suivie d’une trainée de fumée blanche. C’est le signal, alors toute la formation largue ses bombes qui tombent en grappes dans un sifflement impressionnant. Ils s’abritent au sol du mieux qu’ils peuvent, ressentent dans tout leur corps l’onde de choc des explosions, une bombe tombe à 20 m d’eux. La dernière vague d’avions largue ses bombes, dans la Loire, puis s’éloigne vers l’est, la D.C.A. cesse ses tirs. Alors un silence pesant règne dans l’immense parc à tôles après tout ce vacarme. Des ouvriers se relèvent, hébétés, ne voulant pas croire que c’est la fin du cauchemar. Il faut alors remettre en service une grue du parc à tôles endommagée par les éclats de bombes, afin de soulever les lourdes tôles de protection pour dégager les victimes. La nuit tombe vite en novembre, et un éclairage provisoire est installé, les Allemands le font éteindre, prétextant une nouvelle alerte. Deux apprentis sont malgré tout dégagés, dont Prosper Beauchène. Avec son copain, ils sont restés enterrés plus de quatre heures, au milieu d’autres apprentis se cramponnant désespérément à eux sous la masse de terre qui les étouffait. Comme tous les blessés, ils sont transportés à l’hôpital, par les ambulances de la Défense Passive ou des pompiers. A leur arrivée, les familles se jettent littéralement sur eux en espérant reconnaître un des leurs.
Le terrible bilan : Dès la fin de l’après-midi, les cadavres des apprentis, des personnels d’encadrement et des ouvriers sont rapidement examinés par les médecins du chantier ainsi que ceux de Saint-Nazaire qui sont accourus. On les dépose ensuite sur un camion avant de les transporter à l’hôpital. Un des sauveteurs, moniteur d’apprentissage, aperçoit un de ses élèves, complètement inerte, mais dont les yeux semblent remuer. Il demande alors aux médecins présents de décharger le corps du jeune homme pour le ranimer. Le docteur Francheteau, médecin du chantier, fait les gestes nécessaires et le présumé mort reprend connaissance, Miracle ! Il est blessé, mais vivant. Ce jeune, c’est Henri Roide, qui avait été transporté au poste de secours, et qui doit son salut à la présence d’esprit de son prof ! Il est gravement blessé aux jambes et sera soigné à l’hôpital de Malestroit.
Les obsèques des apprentis trignacais, coll. Michel Mahé
Le lendemain matin 10 novembre, il y a de la glace. Les sauveteurs continuent de fouiller et de nouveaux cadavres sont découverts au milieu des décombres. Ferdinand Michel, avec l’ambulance de la Défense passive transporte vers l’hôpital deux corps d’apprentis encore tièdes. Certaines familles viennent sur les lieux, dans l’espoir de retrouver leur fils, et se mettent à fouiller dans ce qui reste des tranchées-abris. On retrouve encore des cadavres, mais ce sont plus souvent des débris humains que les sauveteurs recueillent pour les transporter à la morgue. Certains apprentis sont méconnaissables, car ils sont morts par asphyxie, leurs têtes sont noires et enflées. Les victimes ne sont identifiables que par leurs vêtements, ou par leur « marron ». Beaucoup d’entre eux ont été brûlés par l’acide des bonbonnes stockées à proximité des abris L’identification des victimes à l’hôpital de Saint-Nazaire ainsi que la reconnaissance par les parents donnent lieu à des scènes déchirantes, dont certains des apprentis hospitalisés seront les malheureux témoins. Les corps des victimes sont alignés côte à côte dans la chapelle de l’hôpital, dans leur tenue de travail, recouverts en partie d’un drap. Le 11 novembre, on les dépose dans les cercueils fournis par les pompes funèbres, ainsi que par les ateliers de menuiserie des chantiers et de l’aviation. Le 12 novembre est le jour des obsèques pour les victimes nazairiennes. Faute de corbillards suffisants, des camions de la S.N.C.A.S.O. portent les cercueils empilés les uns sur les autres comme des caisses de marchandises. Dans le dernier camion, de petites boites contiennent les restes non identifiés. Les cercueils alignés remplissent l’église Saint-Nazaire. Toutes les familles ne pourront assister à l’office funèbre tant la foule est nombreuse. De sourdes rumeurs s’élèvent quand des officiers allemands s’approchent avec des fleurs. Le Préfet prononce une allocation dans une atmosphère tendue, et il est hué quand il parle maladroitement des « oiseaux de mort qui viennent dévaster la France ». A la sortie de l’église, le cortège à pied se forme. Le convoi fait une halte au cimetière de la Briandais, où les cercueils sont portés vers le centre à l’épaule. Puis la cérémonie se termine au cimetière de Toutes Aides où sont inhumées la plupart des victimes.
Une bombe non explosée retrouvée en 1945, livret des apprentis rescapés
Les mêmes cérémonies se déroulent dans toutes les communes d’où sont originaires les apprentis. La population manifeste toute sa sympathie devant ce terrible drame. Les apprentis reposent dans 21 cimetières, à Saint-Nazaire et dans la région proche. Les blessés, pris en charge par les médecins des chantiers, comme le docteur Francheteau, et les sauveteurs de la Défense Passive, sont soignés après leur entrée à l’hôpital par le personnel qui fait le maximum afin de les soulager, ainsi que par les médecins, parmi lesquels les docteurs Avril, Jagot, Poussier, Gentin, Allaire, Jacquerot. On dénombre finalement parmi les morts 134 apprentis, 10 chefs d’atelier, contremaîtres, moniteurs ou aides-moniteurs, employés d’apprentissage, ainsi que 19 ouvriers du chantier. En ajoutant les victimes civiles en dehors des chantiers navals, le bilan de ce jour funeste se monte à 186 morts et 129 blessés Les apprentis rescapés seront en grande partie victimes après cette journée tragique de ce qu’on nomme aujourd’hui les troubles du stress post-traumatique, se traduisant par une grande souffrance morale, des complications physiques, qui altèrent profondément la vie personnelle, sociale et professionnelle. Il n’y a pas non plus encore de psychologues qui pourraient les prendre en charge et atténuer leurs problèmes. Pour eux, l’émotion sera toujours présente à chaque évocation de ce terrible drame. Certains d’entre eux, par la suite, s’orienteront vers d’autres activités, mais la plupart termineront leur apprentissage au chantier. Et que dire des familles des apprentis décédés. Elles vivront le même calvaire tout au long de leur vie, en pensant sans cesse à leur cher enfant, quelquefois unique, disparu au cours de ce terrible bombardement. Le mois de novembre 1942 voit se poursuivre les bombardements sur Saint-Nazaire. Le 14 on déplore 8 morts et 15 blessés, le 17 les chantiers sont de nouveau visés, on compte 78 morts, pour la plupart des ouvriers et 200 blessés. Le 18, on déplore 2 morts et 17 blessés, et enfin le 23 sur Trignac et Saint-Nazaire, où on compte 17 morts et 17 blessés.
Les victimes de Montoir :
Les apprentis décédés :
Marcel Cabane à 11 ans, livret des apprentis rescapés
CABANE Marcel : né le 13-6-1928 : apprenti 1ère année habitait 50 rue Jules Verne à Montoir LEGRALL Marcel : né le 5-5-1928 à Montoir apprenti 1ère année habitait 157 rue Anatole France à Gron. Il fréquentait l’ecole Paul Bert de Méan.Il parlait le breton. Marcel avait la tête bandée conséquence supposée de l’acide qui s’était déposé sur les tôles couvrant les abris. DESMARS Jean : né le24-12-1927 à Trignac habitait 17 rue de Chateaubriant à Montoir. MESTRIC Marcel : né le 2-1-1927 à Montoir, habitait Loncé.
Marcel Le Grall, coll. Nadège Atinault
DAVID André : né le 10-4-1928, habitait 31 rue Anatole France à Gron.
Les rescapés de ce bombardement : SURZUR Emile : Emile à été sauvé par Lucien Briand qui était au dessous de lui dans les gravats de la tranchée. ALLAIRE Paul : né en janvier 1926 apprenti chaudronnier, Paul est rentré en retard à l’apprentissage à la suite d’une appendicite. Il a été scalpé par un éclat lors du bombardement. BRIAND Lucien : apprenti 2ème année chaudronnier. THOREL Albert : était en 1ère année a été blessé au dos
Un ouvrier venu secourir : M. BARBATEAU Roger : décédé 10 jours après le bombardement, des suites de ses blessures.
Le drame aurait-il pu être évité ? En juin 1942, la municipalité de Saint-Nazaire, au vu du risque lié à l’imminence d’attaques aériennes massives, propose à la direction des chantiers de délocaliser les cours d’apprentissage, installés sur le site si exposé du chantier naval. La direction refuse au prétexte que cela aurait désorganisé le travail. Quelques jours après le drame, un des parents bouleversés prend sa plume pour écrire au directeur des chantiers de Penhoët. « C’est avec tristesse que nous avons le devoir de vous faire connaître les sentiments de toutes les familles endeuillées, pleurant la mort de petits enfants confiés à vos soins sur le chantier de Penhoët », écrit-il. Dans cette lettre bouleversante, les familles s’octroient : « le droit de demander des explications et le devoir de vous accuser de ne pas avoir su organiser des abris contre les bombardements ». Il ne faut pas oublier que l’Allemagne nazie est la première responsable de tous ces décès. Mais la polémique qui est née à la suite du drame n’a guère épargné l’Etat-major allié, coupable d’avoir mené cette opération en plein jour. Quant aux responsables des chantiers, ils se doivent de répondre à cette question des abris, peut-être suffisants au début de la guerre, mais qui « ne répondent plus à la réalité des bombardements ». Les abris étaient manifestement inadaptés, et les apprentis y sont restés piégés et recouverts de terre et de gravats, dans ces tranchées meubles, non cimentées sur le fond et sur les côtés, sur lesquelles étaient posées deux couches de 2 cm d’épaisseur. Ce « blindage » de 40 mm n’a pas résisté aux bombes de 500 kg larguées par les Américains. Trente-cinq impacts seront relevés au sol dans un rayon de 500 m. La présence d’acide à proximité des abris ravive la douleur des parents qui s’interrogent : « Pourquoi fallait-il que des bonbonnes d’acide fussent posées sur les tranchées ? Pourquoi ? De pauvres petits furent brûlés, ce qui ajoute à l’horreur de leur agonie »
La mémoire du drame : Dans tous les cimetières de la région nazairienne, chaque année, le 9 novembre, une cérémonie a lieu en souvenir des victimes fauchées en pleine jeunesse, il y a maintenant 80 ans. Une stèle au cimetière de Toutes Aides à Saint-Nazaire perpétue le souvenir.
Le mémorial de Toutes-Aides, coll. Michel Mahé
Créée en 1961 pour obtenir réparation, l’association des Parents des victimes et rescapés organise chaque année la commémoration et fleurit les tombes de leurs malheureux camarades. Diverses actions ont été entreprises, en lien avec l’éducation nationale ou avec des municipalités, pour que la mémoire perdure. « Malgré leur grand âge, les derniers rescapés s’efforcent de toujours commémorer cet évènement douloureux. Nous souhaitons toujours retrouver les familles et témoins pour retracer la courte vie des jeunes victimes de ce bombardement » indiquait il y a quelque temps Serge Paquet, président de l’association, dans un article d’Ouest-France.
L’inauguration du mémorial nazairien en 2019, Photo Ouest-France
Un projet a été réalisé il y a dix ans avec les collégiens du Collège Julien Lambot de Trignac, auquel ont participé Joseph Michel et Paul Guiho, rescapés du bombardement. Les jeunes élèves se sont fortement intéressés à ce drame dans lequel des adolescents de leur âge avaient péri. Le 9 novembre 2019, un mémorial a été inauguré aux chantiers de l’Atlantique, le long du chantier naval, rue de la prise d’eau à l’emplacement où se situait l’école d’apprentissage, en présence du maire David Samzun et de Joseph Michel, dernier survivant des apprentis rescapés. Celui-ci est décédé en mars 2022 à l’âge de 94 ans. En 2021, la municipalité de Montoir a pris l’initiative de faire poser une plaque au cimetière du bourg, portant le nom des 5 apprentis montoirins décédés. En cette année 2022, le projet d’érection d’une stèle, toujours à Montoir de Bretagne, s’est concrétisé à l’initiative de la municipalité. Cette œuvre du sculpteur Bernard Larcher a été inaugurée au cimetière de Montoir le 9 novembre 2022, à l’occasion de la cérémonie qui marquait l’anniversaire des 80 ans de ce drame, et en présence de quelques familles d’apprentis décédés ou rescapés, ainsi que des apprentis de l’EPAN (Ecole de Production de l’Agglomération Nazairienne) de Montoir de Bretagne. Dans les cimetières de toutes les communes où reposent les apprentis, des cérémonies ont également eu lieu.
L‘inauguration de la stèle à Montoir le 9/11/2022, coll. Michel Mahé
Enfin, une autre cérémonie s’est déroulée le samedi 12 novembre à 14h00 pour les 16 communes touchées sur le lieu même du bombardement là où se trouve le mémorial. La société M.A.N. a accueilli les participants dans la cour devant les ateliers. Tous se sont recueillis devant la stèle située avenue de la prise d’eau, proche de l’endroit où eut lieu le bombardement, devant la société M.A.N. 12 apprentis du lycée André Boulloche ont égrené les noms des 134 victimes avant le dépôt des gerbes. Je voudrais citer pour terminer une phrase tirée du témoignage de Monsieur Guiot, apprenti rescapé de Pontchâteau, et parlant des Américains, envers lesquels la population nazairienne gardera longtemps de la rancœur : « Nos libérateurs ne venaient pas pour anéantir la population, mais dans le but précis de réduire à néant les points stratégiques
Une partie de l’équipage du B 17 Man ‘O War, disparu en mer
après le bombardement du 9 novembre 1942, coll. Richard Weaver
construits par l’occupant allemand, en particulier la base sous-marine ». 22 jeunes aviateurs américains, âgés d’une vingtaine d’années, périrent également en ce 9 novembre. En ces temps troublés, marqués par de nombreux conflits dans le monde, où de nouveau une guerre se déroule en Europe, ce devoir de mémoire est plus que jamais nécessaire, afin de ne jamais oublier cette période douloureuse de la deuxième guerre mondiale où notre pays a tant souffert, mais aussi pour délivrer un message aux jeunes générations. Bâtir un monde solidaire, un monde de Paix, ce sont les objectifs qu’elles doivent se donner.
Bibliographie et sources : Presse-océan novembre 1992, article de Jean-Claude Chemin Presse-Océan du 09/11/2002, article de Franck Labarre Ouest-France du 09/11/2012, article de Frédéric Salle En Envor, La Bretagne zone de bombardement durant la deuxième guerre mondiale, Erwan Le Gall Fernand Guériff, Historique de Saint-Nazaire, tome 2, Imprimerie de la Presqu’ile Guérandaise, 1963 9 novembre 1942, Saint-Nazaire sous les bombardements, plaquette coordonnée et saisie par l’Ecomusée de Saint-Nazaire, Imprimerie municipale Saint-Nazaire, 1992. Aremors, Etudes et Documents, Saint-Nazaire et le mouvement ouvrier de 1939 à 1945, imprimerie Atlantic offset, 1986 Michel Lugez, Missions de bombardements américains sur Saint-Nazaire, Editions Ouest-France, 1998
Remerciements à Monsieur Serge Paquet, président du groupement des apprentis rescapés, pour son aide précieuse et pour la fourniture de documents.
Estienne ( Étienne) Chaillon, est né le 8 avril 1736 au village du Pin, en Guersac, commune de Montoir. Il était le fils unique d’Estienne Chaillon, capitaine au long cours, qui mourut en mer, et de Perrine Vince.
Étienne Chaillon a reçu une éducation soignée et fut admis Avocat au Parlement de Rennes. Il vient s’établir à Montoir en 1762 lorsqu’il épouse Julienne Olliveau. Elle lui a donné 15 enfants. 9 ont survécu après la naissance. Elle décède le 1er avril 1790, à l’âge de 47 ans. Il se remarie en 1795, avec Eulalie Bouillet, âgée de 40 ans, nièce d’un médecin de Cordemais.
Il a exercé diverses fonctions:
En 1765, il est notaire des juridictions de Donges, de Martigné, de l‘Angle et de Sévigné. En 1766, il devient procureur fiscal de la juridiction d’Heinlex, en 1769, de celles de Bratz en Montoir, Trégonneau, Chateauloup et Kercabus. En 1769, il est sénéchal de Crossac, de Savenay, de la vicomté de Saint Nazaire et la baronnie de Marsaint.
Très travailleur, honnête et consciencieux, il acquit une grande notoriété dans la région.
Le 11 octobre 1774, il est nommé procureur spécial par les habitants de Montoir et de Saint Joachim pour s’opposer au dessèchement des marais souhaité par la Société Debray et Cie.
Le 11 juillet 1775, il présente aux commissaires, un long document avec tous les éléments possibles, côtoyant le sérieux et le déraisonnable, et les contre-vérités. La dernière partie du document est signée du Me Chirurgien Emmanuel Ollivaud qui soulignent les dangers que le dessèchement pourrait faire courir à la santé publique, à une époque où l’on a déjà bien conscience de la nocivité des marécages et des eaux stagnantes.
Étienne Chaillon, le révolutionnaire.
Ouvert aux idées nouvelles qui commencent à se faire jour en France, il se laisse tenter par la politique.
Le 4 novembre 1788, avec 11 de ses collègues Nantais, il part pour Versailles à la préparation des États Généraux. Le 1er avril 1789, il est chargé de la rédaction des Cahiers de Doléances des sénéchaussées réunies de Nantes et de Guérande. Il est le rédacteur de celui de Montoir dont l’ autre particularité, est qu’il est signé par des femmes, les hommes étaient en mer.
Des extraits du cahier Montoirin :
« Nous demandons la transformation des États Généraux en une Assemblée Nationale Constituante. Que le Tiers État soit déclaré nul avec une seul ordre, ni noblesse, ni clergé. Les impôts et les charges seront également répartis et supportés par l’ensemble des sujets de sa Majesté Roi. Seule la Loi sera citée et exécutée. Les francs fiefs, maîtrises et jurandes seront supprimés. La justice sera rendue gratuitement, et tout accusé aura droit à un avocat de son choix. La France aura deux codes, le code civil et le code criminel. La dîme ecclésiastique sera supprimée, mais la paroisse devra attribuer au recteur et au vicaire une pension. Nul sera censé pauvre s’il peut gagner sa vie et qui pris à mendier sera soldat sur terre ou en mer et les filles seront occupées à des travaux utiles dans des maisons destinées ».
Dernière page du cahier de doléances de Montoir rédigé par Etienne Chaillon et signé par Perrine Houget, Marie Fouré, Perrine Maillard, Perrine Fesnaux, Jeanne André et Pérrine Gouin.
Il est élu député du Tiers-état aux États généraux et membre de la première Assemblée Nationale Constituante du 20 avril 1789 jusqu’au 30 septembre 1791. Il ne reviendra en Brière qu’en octobre 1791, après que la constituante se fut séparée. Le 23 février 1792, il est nommé commissaire pour l’assiette des contributions foncières et mobilières de Montoir, Saint Joachim, Crossac et Saint Nazaire. En juin 1792, c’est l’ « affaire de Pendille », à Saint Joachim dont il est le principal instigateur et le premier responsable de cette déroute.
L’affaire de Pendille, c’est l’affrontement qui eut lieu dans la nuit du 2 au 3 juin au village de Pendille à Saint Joachim entre les habitants et une troupe d’hommes, dragons et gardes nationaux menés par Étienne Chaillon. Pour comprendre l’origine de cette affaire, il faut se souvenir que Chaillon est alors dans une situation ambiguë. Sans mandat officiel entre ses deux députations à la Constituante avant et à la Convention après, il est de passage à Montoir pour quelques mois. Il se rend compte du fossé qui s’est creusé entre lui et le peuple, et veut se rendre utile. Il ne comprend pas sa réaction et décide de le mater. A Pendille, il se fait piéger et perd la bataille.
Le 4 septembre 1792, il est élu député de la Loire Inférieure à la Convention. Il quitte alors Montoir avec deux de ses filles et une domestique Briéronne, pour s’installer Rue Saint Honoré chez le graveur Helleman…. « Et le voilà mêlé au grand flot révolutionnaire, à la terreur ». Le 16 janvier 1793, lors du vote à la convention sur la peine encourue par Louis XVI, il déclare : « Je suis convaincu que mes commettants ne m’ont pas envoyé pour juger, pas plus que pour exercer les fonctions de juré, mais pour faire des lois. Je tiens mon mandat d’hommes justes, ennemis de la tyrannie et qui auraient rejeté loin d’eux cette cumulation des pouvoirs. C’est donc comme homme d’État et pour mesure de sûreté générale que je vote pour la réclusion d’abord et pour le bannissement après la guerre. Je m’oppose à la mort de Louis, précisément parce que Rome la voudrait pour le béatifier ».
Cette attitude lui valut un décret d’accusation. Mais atteint d’une fièvre infectieuse, Étienne Chaillon est alité. Or, coïncidence heureuse, ce fut son médecin, membre du Comité de Salut Public, qui fut chargé de l’arrêter et qui le sauva en déclarant : « Inutile de guillotiner ce bougre-là, il est foutu ».
La Terreur passa et Étienne Chaillon se rétablit.
En février 1795, il participe aux négociations menées à l’instigation du Général Hoche, s’appuyant sur les promesses d’amnisties de la Convention. Ces négociations se déroulent entre les représentants en mission, Chaillon et Gaudin, les Généraux Canclaux et Beaupuy du côté républicain et les chefs Vendéens, Charette à leur tête.
Signature d’Etienne Chaillon
Le 26 février 1795, un traité est signé avec des clauses avantageuses pour les Vendéens, au Manoir de la Jaunaie à Saint Sébastien sur Loire. Nommé membre du Conseil des Anciens, il habitait rue Caumartin, à Paris. Il y décède le 3 avril 1796, à l’âge de 59 ans.
Une place lui est dénommée à Montoir de Bretagne. Elle se situe au carrefour de la rue de Normandie et la rue du Maine. Mais, Étienne Chaillon a vécu à Montoir, place de l’église. Une question se pose : Quelle était sa maison. Au 10, rue Pierre Curie, face à la sortie de l’église, la maison a été habitée par son petit fils Alphonse Chaillon, docteur, décédé en 1861. Fernand Guériff, dans ses écrits sur l’histoire de Montoir, déclare à propos de la maison du n°4 de la même rue : « Traditionnellement, on attribue cette maison à Étienne Chaillon ». Mais le propriétaire actuel précise qu’il y a de gravé dans la pierre de son habitation « 1831 ». Y avait-il une autre maison sur ce lieu ?
La maison du 10 au début du XXe siècle, devenue une pharmacie, puis en octobre 1966 et aujourd’hui,
et celle du 4 au début du XXe siècle ( au centre) et aujourd’hui.
Sources : Balade autour du Pin par l’association Le Pas de Saint Malo. Histoire de Montoir par Fernand Guériff. Promenade dans le passé de Montoir de Bretagne (OSCM). Extraits de la base Généalogique des Brières d’Yves Moyon.
Le GATM (Groupe Animation Tourisme Montoir) et le service culture de la ville vous proposent de faire une balade dans le centre bourg, entre la place du marché et le complexe sportif, afin de découvrir des photographies du Montoir au début du XXe siècle. Cette exposition est permanente et sera complétée dans l’autre quartier de la ville l’an prochain.
Musée de Plein Air
Départ près du Musée de la Marine en bois du Brivet, 6, rue Chateaubriand
1 – Autrefois, un presbytère, ce bâtiment est devenu la mairie en 1905, lors de la séparation de l’église et de l’État, jusqu’en 1988. En 2000, il est devenu le Musée de la Marine en bois du Brivet.
2 – L’Hôtel-Auberge du Cheval Blanc dont la spécialité, au début du XX siècle, était le beurre blanc.
3 – Place du Champs de Foire où se rassemblaient les Montoirines et Montoirins lors des foires, marchés et fêtes
4 – Fête foraine sur le Champs de Foire
5 – La gare du petit train du Morbihan. Cette voie rejoignait à Trignac, la voie qui venait de la Rochebernard transportant les ouvriers des Forges de Trignac et de la construction navale. Le terminus de ce train se trouvait dans la gare de Saint Nazaire, aujourd’hui,près du Théâtre.
6 – La rue Georges Sand, où il y avait des chaumières
7 – La Maison hospitalière créée par des religieuses, devenue la Résidence l’Automne
8 – La route de Revin, la campagne était très proche du centre bourg
9 – La Croix Vaujoyeux. Ce calvaire, dédié à la Vierge a été construite par le capitaine Vaujoyeux, marin de Montoir, en reconnaissance d’être sorti indeme, lui et son équipage d’une énorme tempête dans les mers des Antilles
10 – La Bonne Fontaine. Cette fontaine avait une source d’eau de grande qualité, très appréciée par les Montoirines et Monroirins qui venait nombreux s’en approvisionner
De la construction des navires en bois à la construction navale en métal : Le rôle des Frères Pereire : « La Compagnie Générale Transatlantique »
A u début du 19ème siècle St Nazaire n’était qu’une bourgade de pécheurs et, c’est sur la commune de Montoir notamment à Méan que se construisaient les navires en bois ( Goélettes, Bricks, Chasses marées ….Etc.).
La décision prise par Napoléon III de construire un port à bassins à flots en 1847 transformera le mode de construction des navires de l’époque
Dans ce changement Emile Pereire (Jacob Rodrigue Émile) né le 3 décembre 1800 à Bordeaux et Isaac Pereire (Isaac Rodrigue) né le 25 Novembre 1806 également à Bordeaux , entrepreneurs et hommes d’affaires français jouèrent un rôle capital
Proche de l’empereur Napoléon III, ils auront l’autorisation de créer par décret « la Société Générale de Crédit mobilier », Banque rêvée depuis vingt ans par les Pereire. dont le but était de drainer l’épargne vers l’industrie et le commerce .
En 1855, ils créeront la Compagnie Générale Maritime et, ils s’inscriront dans un courant d’industriels français qui à cette époque, se lançaient dans de grandes entreprises.
Le besoin d’une marine marchande française se faisant pressant, la Société Générale de Crédit Mobilier deviendra le principal actionnaire de cette nouvelle compagnie.
La Compagnie Générale Maritime sera officiellement créée le 24 février 1855, avec des statuts qui lui donneront pour but: » Toutes opérations de construction, d’armement et d’affrètement de tous navires et en général toutes opérations de commerce maritime «
Les débuts de la compagnie seront particulièrement difficiles du fait des difficultés relatives à la mise en place des lignes maritimes . Le capital de celle ci se trouvera de ce fait presque épuisé
Après cette quasi-faillite, les Péreire comprendront qu’à, l’exemple de la compagnie anglaise « CUNARD’ qu’ils auront tout intérêt à se recentrer sur un service de paquebots financé par des conventions postales.
Napoléon III, séduit par le concept, en proposera un certain nombre sur le marché mais, les frères Péreire les refuseront les jugeant trop faibles. De ce fait, nombre d’armateurs , se retrouveront en difficulté dès 1860.
C’est le moment que choisira Isaac Péreire pour renégocier sa convention avec l’État.
Au travers de cette nouvelle convention, la Compagnie générale maritime s’engagera à desservir pendant vingt ans des lignes transatlantiques : Le Havre – New York (avec escale à Brest), Saint-Nazaire – Isthme de Panama et trois services annexes pour la Guadeloupe, le Mexique et Cayenne : (Il faut préciser, qu’à cette époque le transport de passagers et du courrier sont réalisés par les mêmes navires)
Ils s’engageront d’autre part, à construire au moins la moitié de leur flotte en France.
En contrepartie de ces engagements, l’État leur versera, une conséquente subvention annuelle.
En 1861, un décret impérial changera le nom de la Compagnie Générale Maritime en » Compagnie Générale Transatlantique, aux fins de mieux coller aux nouvelles orientations. Ce sera le début de la grande épopée de « La Transat »
La construction des premiers navires (au nombre de 6 )débutera à l’étranger, notamment avec le Washington, premier paquebot de la ligne de New York car les prix pratiqués, étaient moins élevés que ceux pratiqués par les chantiers Français.
Fort de ce constat, les frères Péreire prendront donc la décision d’acquérir des terrains à Saint- Nazaire pour y fonder les Chantiers et Ateliers de Saint-Nazaire (qui deviendront par la suite les Chantiers de Penhoët)
Le démarrage de l’activité, se fera avec le concours des ingénieurs des chantiers écossais de John Scott qui fourniront leur expertise aux ouvriers et architectes navals français
A cette époque, les chantiers ne construiront que les coques des navires. Les machines étaient elles achetées au Creusot
C’est ainsi que prendra la fin de la construction des navires en bois des chantiers du Brivet. Mais ,la main d’œuvre Briéronne Charpentiers, Calfateurs se reconvertira et prendra la direction des chantiers et ateliers de Saint Nazaire passant du bois au métal
En 1862, deux ans avant la date prévue, le paquebot Louisiane inaugurera la ligne vers le Mexique, saluant ainsi la première réussite de la « CGT ». Cette ligne était particulièrement attendue par le pouvoir, dans le cadre de l’intervention militaire Française au Mexique
Le départ du Louisiane de Saint Nazaire
En 1864, ce sera au tour du service postal à destination de New York d’être inauguré avec le Washington, puis, ensuite avec, le France (premier du nom) et ensuite l’Impératrice Eugénie.
Ces navires, d’une centaine de mètres de longs étaient équipés de roues à aubes. Trois ans plus tard, ils seront modifiés pour adopter une propulsion à hélices réduisant de ce fait la consommation de charbon (combustible utilisé à l’époque)
L’impératrice Eugénie (dont une maquette se trouve au musée de la marine en bois à Montoir)
En 1867, une gare ferroviaire monumentale sera construite à proximité des quais où seront amarrés les paquebots (l’actuel quai Péreire). Saint-Nazaire deviendra alors le port français de l’Atlantique le plus proche de Paris pour les passagers
Par la suite ,les Frères Péreire réaliseront de nombreuses opérations immobilières, avec la création de la Société immobilière. en participeront à la modernisation de Paris engagée par le préfet Haussmann ( une des grandes réussites du second empire)
De 1862 à 1973, 483 navires paquebots et cargos, ont arboré le pavillon rouge de la Compagnie Générale Transatlantique sur toutes les mers du monde.
Epilogue
Le 23 février 1977, l’état qui était aussi l’actionnaire de la Cie des Messageries Maritimes qui elle desservait l’Orient et l’Asie fusionnera celle ci avec la Compagnie Générale Transatlantique, les incorporant dans la Compagnie Générale Maritime qui avait été créée par décret en décembre 1973 et qui restait une coquille vide.
La CGM était sur les rails.
Les couts de la main d’œuvre portuaire qui chargeaient et déchargeaient les cargos transportant les marchandises diverses étant très élevés, la compagnie fit évoluer sa flotte remplaçant ceux ci par des navires rouliers et porte conteneurs
Ces navires nécessitaient l’utilisation moins de main d’œuvre et les temps d’escales était plus que réduits, ce qui assurait de ce fait une meilleure rentabilité .
Malgré cela, en 1996, le Président Chirac désengagera l’état et cédera pour une somme dérisoire la CGM « Compagnie Générale Maritime » à l’armateur Libanais Jacques Saadé installé à Marseille qui la fusionnera avec la Compagnie Maritime d’Affrètement, dont il était le propriétaire
La nouvelle entité qui prendra le nom de CMA-CGM, deviendra au fil des années l’une des plus grandes entreprises mondiales de transport de fret par voie maritime se hissant au rang de troisième armateur mondial
Lors d’une conférence au Jardin Médiéval des Caves, Jacques Hédin, ancien chargé de mission environnement du Parc Naturel Régional de Brière et membre du GATM, nous a parlé des migrations.
Voici la lettre de cette conférence:
Les migrations en quelques mots :
Le dictionnaire indique le latin migratio de migrare : changer de séjour. Déplacement cyclique ou définitif d’une importante population animale ou végétale homogène. La langue moderne distingue l’émigration (définitive) de la migration (saisonnière ou cyclique). Qu’ils migrent ou émigrent, tous les animaux qui se déplacent sont dénommés migrateurs. Je restreindrai à quelques exceptions près mon propos aux migrations d’oiseaux.
Quelques moments vécus :
Une migration d’Oies cendré au Marquenterre en Octobre 1977 : avec les enfants.
Une migration de Pluviers argenté en Baie de Somme en Septembre 1976 par temps de brouillard. La migration des Grues cendré en Chalosse : novembre 1989 et les phénomènes d’ascension. Les plus gros passages de Cigogne blanche en Mai et noire en Aout en fin des années 1980 à Rozé et Besné. La migration exceptionnelle de Canards et d’Oies à la fin de l’année 2020. Surtout notée par les chasseurs du nord de la France, mais aussi visible chez nous pour les canard Pilet Souchet et surtout Siffleur. Mais aussi : Les migrations estivales de Coccinelle au Sud de la Somme
Origine des migrations :
Certains citent cette origine à la fin de l’ère glaciaire: cas de l’hirondelle originaire d’Afrique qui a la fonte des glaces a progressivement occupé des espaces nordiques libérés. D’autres évoquent des habitudes beaucoup plus lointaines liées notamment à dévire progressive des continents. Les études récentes permettent de cerner des évolutions dans le temps et l’espace des migrateurs selon les espèces. Parmi les certitudes, il en est une incontournable: la migration des oiseaux n’est avantageuse que si la mortalité qu’elle entraîne, est plus faible que celle due à la famine hivernale sur les lieux de reproduction.
Migrations aller / retour : migration d’automne et de printemps :
Migration post nuptiale
Si l’on parle de migration, le plus souvent nous vient à l’esprit la période de l’automne propice à ces mouvements. Dans ce cas la migration est motivée par la recherche de nourriture, mais celle-ci nécessite du carburant (emmagasiné dans les graisses) réflexe plus rapide chez l’adulte que chez le jeune.
Migration pré nuptiale
Au « Printemps », la migration de retour est conditionnée en premier par le besoin de reproduction, qui doit d’abord passer par la formation des couples (pour ceux qui ne sont pas unis de façon durable). Le vent dans les deux cas joue un rôle non négligeable. Au milieu de l’Automne, installé au NE, il préfigure la possibilité d’une vague de froid et déclenche les départs. Au printemps, le vent de SE apporte le soutien à l’oiseau en vol. Dans les deux cas, le vent d’Ouest est synonyme de pluie, voire de tempête et n’incite pas souvent les oiseaux à effectuer leur migration sauf pour ceux dits anglais qui rejoignent alors le continent.
Une astuce : pour localiser les masses d’air, il suffit de se mettre dos au vent, se tourner de 45° à droite, alors l’Anticyclone est à droite et la dépression à gauche.
Les migrations régulières :
Selon les oiseaux, les migrations s’étalent sur plusieurs mois, cependant pour certaines espèces des pics de migrations sont plus régulièrement observés à dates fixes :
Quelques dates en Eté :
Sur le bord de mer, la fin juillet et le début août voient apparaitre les premiers migrateurs, il s’agit surtout des limicoles tels que les Pluviers et chevaliers (gambette, aboyeur) et aussi des premiers rassemblements en vues des migrations (Sternes).
La Madeleine : autour du 15 aout, cette période est propice à l’observation des Bécassine des marais par groupe parfois d’importance (15/25 ind.)
Quelques dates en Automne :
La pleine lune d’ Octobre : appelée la lune à » couette » (dans la somme) qui concerne plutôt le passage des Grives, Corvidés et apparentés
La St Luc : le 18 Octobre est une date incontournable dans le Sud et attendu par tous les fervents de la chasse à la Palombe.
Entre fin Septembre et début Octobre : on peut observer des bandes d’Oies cendrée et surtout rieuse traverser notre région. Il ne s’agit pas forcément des précurseuses, mais plutôt d’un reste de migration précoce liée à la disposition de nourriture chez nous,en France: maïs, pomme de terre, haricot, suite à des pratiques agricoles anciennes laissant de la nourriture non ramassée dans les champs.
La lune de novembre : appelée elle la lune des canards est réputés des chasseurs de gibiers d’eau dans le Nord et l’Ouest de la France.
Quelques dates au Printemps :
Le mois de Mai était incontournable pour la migration des Cigognes et des Spatules blanches. Les petits limicoles Barge à queue noire et le Combattant varié ont typiquement deux périodes de migration de printemps séparées de 15 jours à 3 semaines entre fin mars et fin avril alors que le Vanneau huppé nous arrive dès le début mars (ces phénomènes s’estompent depuis une quinzaine d’année). D’autres Limicoles plus nordiques (Pluviers et Courlis) passent courant Avril début mai, on les appelle en bord de mer, les avrillots. Parmi les hirondelles, le plus souvent en tête, l’hirondelle de rivage parfois dès fin février, suivi de l’Hirondelle de cheminée, le Martinet pointe le bout de son bec au premier Avril, date des premiers Coucous.
Quelques périodes de la journée :
certaines espèces voient des pics de migrations plutôt en journée (Hirondelles, Rapaces ), plutôt de nuit (Bécasse des bois, Foulque macroule), tout étant fonction aussi de la durée du vol des conditions atmosphériques et de l’ âge du capitaine, la situation de l’observateur.
Quelques itinéraires de migrations :
Lorsque l’on parle de migrations, on conçoit toujours des mouvements Nord/Sud et vice et versa, ces itinéraires ne sont pas immuables et peuvent s’adapter à certains facteurs naturels( voir les cartes). A noter dans les voies migratoires, les rétrécissement liés aux franchissement, d’où l’importance des détroits, des succession d’îles ou des montagnes et le positionnement des vallées.
L’évolution des itinéraires de migrations :
Ces itinéraires peuvent parfois sembler incohérents, c’est le cas du Traquet Motteux nichant du nord de l’Europe de l’Ouest jusqu’en Sibérie Orientale qui va hiverner en Afrique. Un petit nombre d’individus ont passé le détroit pour aller nicher en Alaska, mais ils continuent de parcourir plus de 16 000 km pour retrouver l’ Afrique.
Certaines espèces ont vu modifier leurs itinéraires comme la Sarcelle d’été dans les années 1970 dû principalement à la sécheresse sur le delta du Sénégal. Pour rechercher l’eau, elles ont parcouru plusieurs centaines de km en amont (vers l’Est). Au printemps, elles sont remontées dans l’axe de leur ancien cap inscrit dans les gènes.
Les migrations à regret :
Certains passages migratoires peuvent avoir lieu en dehors de ces périodes de descente, ils sont le plus souvent liés à l’arrivée d’une vague de froid tardive. Ceci après souvent un automne clément sur les sites de reproduction nordiques incitant les oiseaux à prolonger leur stationnement. Devant la perte d’accessibilité à la nourriture (ou à l’eau), les oiseaux n’ont alors comme autre ressource que celle de se déplacer vers des cieux plus cléments : ce sont des migrateurs à regret. Ils payent quelquefois un lourd tribu d’autant plus si la vague de froid s’installe en provenance du Sud les obligeant à aller encore plus loin sans la réserve de graisse préalablement emmagasinée.
Phénomènes de rémanence :
Beaucoup d’ espèces qui ont une aire de répartition large, ont plusieurs lignes de lignes de migration selon leur lieu de reproduction. Dans le cas du Canard siffleur, certains nichant au Nord Est empruntent la ligne Rhin/Rhône à son début et bifurquent ensuite pour regagner la ligne Atlantique. Il peut s’agir d’un phénomène naturel susceptible de favoriser le brassage génétique.
Des migrateurs accidentels :
Ce peut être le cas pour des Grues cendré dont la migration s’est déportée à l’Ouest par des conditions climatiques continentales comme dans les années 1990, en Brière. un ou quelques individus en groupe : C’est souvent le cas pour des limicoles Nord-américains observés sur la côte. Le plus souvent confrontés à des tempêtes les désorientant (notion de Vimers en marais breton-vendéen). L’inverse est aussi le cas avec des oiseaux européens sur la côte américaine (ex : Héron cendré).
Comment mieux comprendre les migrations :
Ce n’est pas ma tasse de thé, car j’aime bien que dans la nature, il reste un coin de mystère, cependant, l’observation aux jumelles, à la lunette ou tout simplement de visu du naturaliste du chasseur ou du promeneur amoureux de la nature pour peu qu’ils soient attentifs et scrupuleux de noter les observations, a longtemps permis de décrypter ce phénomène. Le must : repérer les survols sur quelques endroits privilégiés comme Orgambidechka (ou à proximité) et voir la vallée toute bleue un peu comme le ciel, de palombes cherchant une ascendance. Mais aussi, comme dit précédemment, tous les sites où se situent des entonnoirs de migration.
Le baguage: nécessite de positionner des filets ou des appareils de capture propre à certaines espèces : les Bécasses au Marquenterre et les Plies en Baie de Somme, maintenant les résultats sont plus probants. La pose d’une bague numérotée permet d’identifier l’oiseau, il faut encore le retrouver vivant ou mort, découvert ou à la chasse si espèce gibier. Les résultats pour les passereaux sont maigres (1 pour 1000 !). Il permet de suivre une Sarcelle baguée à Hambourg en fin de journée et tuée en Baie de Somme dans la nuit (1973), le parcours d’un Bécasseau maubèche bagué en presqu’île de Thulé (Groenland)juste volant (début Juin) et tué dans les Traicts du Croisic début Aout(1985). Les pérégrinations d’un Etourneau sansonnet et d’un Bécasseau variable bagués ensemble en Hollande et à nouveau repris ensemble dans le nord de la France plusieurs mois après.
Les bagues colorées : par le jeu des couleurs permettent d’identifier à l’aide de jumelles, le bagueur, l’âge et le sexe de l’oiseau. De même pour les bagues numérotées apposées sur des oiseaux plus gros. Les bagues nasales sont aussi en vigueur surtout pour les Anatidés
Les colliers GPS permettent suivre les oiseaux tout au long de leur cycle annuel et leur trajet migratoire au plus près. Exemple pour les jeunes Oies cendré nées sur le Banc de Bilho.
Les radars permettent aussi de vérifier l’altitude atteinte par les oiseaux en migration, jusqu’à 1200m pour certains passereaux. Les expérimentations sur des individus en laboratoire ont surtout porté sur l’influence des champs magnétiques (horloge interne) et sur l’influence de la voûte céleste et les positions des étoiles.
Les influences de l’homme sur les migrations :
Les obstacles : le développement urbain et ses éclazirages,les lignes THT, les éoliennes. La pollution organique ou chimique. La suppression des haltes essentielles. La chasse (historique et nouvelles gestions) le cas du Pigeon migrateur américain est typique (le dernier spécimen au siècle dernier s’est éteint en captivité en 1914). le réchauffement climatique: espèces méditerranéennes: cas des espèces méditerranéennes qui remontent nicher plus au nord : Héron Garde Bœuf, Grande Aigrette, et espèces nordiques de moins en moins observées en période hivernale : comme le Cygne chanteur (à ne pas confondre avec le Cygne tuberculé) ou le Garrot à oeil d’or.
Les espèces invasives : qui par définition modifient le milieu où elles vivent et le rendent inapte à la bonne reproduction de certaines espèces.
Quelques oiseaux migrateurs :
Canard Pilet : une espèce qui ne migre pas de même façon chez les mâles et les femelles.
Phragmite aquatique : un passereaux en péril devant la diminution de ses haltes migratoires
La Sterne arctique : championne du monde de la migration du Pôle Nord au Pôle Sud.
L’Oie à tête barrée : championne su monde de la hauteur (+ 10 000 m) au-dessus de l’Himalaya.
Et pour finir un poisson migrateur : l’ Anguille :
J’ai toujours en mémoire les paroles de Franciane ( ancienne directrice de l’école d’Aignac ) qui se souvenait, étant jeune de demander à sa maman une passoire, et avec son seau de plage partait sur les bords de Loire faire un petit canal sur le sable pour y collecter les civelles. Appelées aussi pibales dans le sud-ouest, elles sont le maillon migrateur d’une espèce aujourd’hui protégée alors qu’elle était indésirable, il y a à peine 40 ans dans les rivières classées à Truite !
S’il est un migrateur gardant encore bien ses secrets, c’est bien elle.
Cependant, depuis plusieurs années, les « pimpeneaux » qui désertaient les marais Brièrons reviennent en nombre de manière sensible, est ce le résultat d’une meilleure gestion des ouvrages, des nouvelles réglementations européennes, d’une concentration des civelles vers la Loire ou de nouvelles sources de nourriture (Ecrevisse de Louisiane) tout comme la Loutre d’Europe, là encore difficile de cerner le facteur principal. Ces animaux soit disant symbole de la bonne qualité de l’eau sont peut être sauvé par une espèce invasive, ne serait-ce pas de l’opportunisme tout simplement ?
Crédit photos: Jean Patrice Damien, Jean Pierre Saliou et Jacques Hédin.